Juin 2022 – Généalogie de la guerre
Toute opération de guerre, qu’elle soit « spéciale » ou autrement dénommée, n’est jamais que l’expression ultime et paroxystique d’un malentendu. Contrairement à l’aphorisme de Clausewitz répété ad nauseam sur la « continuation de la politique par d’autres moyens », la guerre, sous quelque forme qu’elle se présente, est une des facettes de la politique, certes la plus violente lorsque celle-ci se réduit à une seule option stratégique. La politique comme la guerre, toujours dans la veine clausewitzienne, est un caméléon et il serait naïf de s’étonner des sursauts chroniques qu’elle impose aux sociétés. Si la vie internationale était aussi soumise au droit et aussi apaisée par de multiples accords et traités qu’on veut bien le croire, nous n’en serions pas à nous effrayer du drame qui se joue dans l’Ukraine orientale et dont nous redoutons qu’il précipite le monde vers l’impensé. L’affaire ukrainienne est exemplaire d’un malentendu général et entretenu non seulement entre Russes et Ukrainiens mais aussi en-deçà entre Ukrainiens eux-mêmes et au-delà entre Européens et entre Occidentaux.