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La Chine n’a pas l’intention de remplacer les États-Unis en tant que superpuissance, par SHEN Dingli*

Récemment, Michael Pillsbury, sinologue américain renommé, a publié son nouveau livre, « The Hundred Year-Marathon: China’s Secret Strategy to Replace America as the Global Superpower » (« Le marathon de cent ans : la stratégie secrète de la Chine pour remplacer l’Amérique en tant que superpuissance »). Il y décrit ce qu’il pense avoir perçu de la stratégie chinoise à long terme : d’abord obtenir des technologies occidentales, puis le développement d’une économie forte, et finalement le remplacement des Etats-Unis en tant que superpuissance mondiale.
Regardons si la Chine est réellement engagée dans ce genre de stratégie. On peut dire que la Chine est en effet bien engagée dans un marathon d’un siècle, mais que c’est celui, depuis le renversement de la monarchie féodale au siècle dernier, de la construction de la démocratie et d’une renaissance nationale. Après avoir connu de nombreuses difficultés et revers, la Chine a repoussé avec succès les puissances qui ont cherché à l’envahir, elle a regagné son indépendance nationale et s’est engagée sur la voie dorée de la réforme et de l’ouverture et de la coopération internationale. La Chine d’aujourd’hui a réussi à parvenir à un niveau de bien-être de base, et est en train de devenir une nouvelle grande puissance émergente, suscitant l’attention du monde entier.
Après être entrée dans le nouveau siècle, la Chine s’est lancée dans une sorte d’« ultra-marathon », celui d’une modernisation globale. Pour ce nouveau marathon, la Chine s’est fixée un objectif plus élevé encore : la réalisation d’un développement global et équilibré en matière politique, économique, social, écologique, scientifique, éducatif et culturel et de défense nationale. Si la Chine sort vainqueur de ce marathon, elle pourra en effet espérer entrer dans le cercle des pays les plus avancés du monde, et réaliser le grand renouveau de la nation chinoise.
C’est un voyage long et difficile, qui a besoin d’une vision ambitieuse, de ténacité, de patience et d’efforts soutenus. À cette fin, la Chine a lancé une politique de réforme et d’ouverture, promu les progrès institutionnels en se débarrassant des vieilleries, promu les droits de l’homme par l’amélioration de la vie des gens, et renforcé la démocratie en recueillant l’avis de la population. Dans ce marathon international, la Chine n’est pas isolée, mais accompagnée par de nombreux pays, dont la plupart sont comme elle, avec le même rêve de progrès, celui du développement national et d’intégration au monde.
Dans ce processus, la Chine s’est présentée publiquement et sans équivoque comme un défenseur de la coopération internationale. A l’ère de la mondialisation, quand tous les pays ont besoin d’optimiser leurs facteurs de production, la Chine a su combiner efficacement ses ressources en main-d’œuvre avec les capitaux et les technologies occidentales. La stratégie de développement de la Chine a, dans une grande mesure, constitué un modèle de réussite pour d’autres pays d’Asie-Pacifique. Pour son ouverture au monde, la Chine s’est engagée sur une nouvelle route avec des caractéristiques qui lui sont propres, avec des objectifs et des moyens clairs. C’est grâce à une coopération franche qui s’est avérée « gagnant-gagnant » que la Chine a su attirer beaucoup d’investissements et de technologies étrangers qui y sont entrés volontairement, et en aucun cas le résultat d’une politique de la canonnière.
Un marathon est une course de longue haleine, pendant laquelle les athlètes chinois, industrieux et courageux, ont progressivement comblé leur retard. En s’inspirant des technologies de pointe des autres pays, la Chine a commencé à apporter sa contribution à l’innovation dans un certain nombre de domaines comme les TGV, l’aéronautique et les communications, et en se montrant frugale et économe, elle a commencé à devenir une exportatrice de capitaux, et la coopération en matière de financement et de coopération technique qu’elle a cherché avec le monde s’est avérée gagnant-gagnant. Nous remercions le monde d’avoir permis à la Chine de prendre le train de la mondialisation en marche. Aujourd’hui, tous les pays sont les bienvenus dans l’ère nouvelle du train à grande vitesse du développement de la Chine.
Quand on étudie on progresse, et plus on étudie plus on progresse. Cela a toujours été dans le caractère de la nation chinoise. C’est une de ses qualités, et elle n’a aucune raison de se sentir mal à l’aise à cause de cela. Si la Chine apprend et attire, c’est pour progresser, c’est parce qu’elle espère un développement fort. Ce désir n’a rien d’anormal, tous les pays ont le même espoir. En outre, avec sa puissance croissante, la Chine apporte une contribution sans précédent au monde, pour le plus grand bien de l’humanité. La compréhension du développement de la Chine, l’apprentissage de ses expériences avancées, a fait consensus et inspiré de nombreux autres pays.
Le point central de l’œuvre de M. Pillsbury est qu’il pense que la Chine a pour ambition de « remplacer à terme les États-Unis en tant que superpuissance mondiale », mais, à l’instar de ceux qui ont des idées similaires à la sienne, il se trompe. Le gouvernement chinois n’a jamais eu ni jamais discuté d’une telle stratégie. Bien sûr, on ne peut pas exclure que certaines personnes en Chine, chérissant leur patrie et l’ayant vu si faible pendant des siècles, aient pour elle une vision de superpuissance de l’avenir. Mais nous sommes convaincus que la Chine, après qu’elle sera devenue plus puissante, ne s’engagera jamais dans des actes de violation délibérée des droits d’un autre pays, sans mandat de l’ONU ou sous quelque prétexte que ce soit. La Chine est désireuse de devenir une puissance de maintien de la paix dans le monde, mais elle est aussi prête à travailler avec les États-Unis et avec d’autres pays pour vivre en paix pendant longtemps. Mais elle n’a aucunement l’intention délibérée de remplacer les États-Unis.

(Source : le Quotidien du Peuple en ligne)

* L’auteur est doyen et professeur de l’Institut des études internationales de l’Université de Fudan (Shanghai).